Les femmes toujours moins bien payées en 2024

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iconeExtrait de l’hebdo n°3911

Le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCE) a publié un bilan de l’Index égalité professionnelle cinq ans après sa création. Deux constats s’imposent : le monde du travail reste la sphère la plus inégalitaire, et l’Index tel qu’il a été conçu n’a pas d’incidence sur cette situation.

Par Claire Nillus— Publié le 12/03/2024 à 13h00

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© HCE

Créé en 2018 par la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, l’Index de l’égalité professionnelle propose de mesurer sur 100 points les écarts salariaux entre hommes et femmes dans les entreprises de plus de 50 salariés. Elles doivent se noter selon quatre ou cinq indicateurs en fonction de leur taille (plus ou moins de 250 salariés) : l’écart de rémunération femmes-hommes dans l’entreprise (40 points) ; l’écart dans les augmentations annuelles (20 points) ; l’écart dans les promotions (15 points) ; les augmentations au retour de congé maternité (15 points) ; la présence de femmes parmi les plus gros salaires de l’entreprise (10 points).

Des écarts persistants

Au 1er mars 2024, 77 % des entreprises de 50 salariés et plus ont publié leur Index avec une moyenne de notes relativement élevée (88 sur 100). Mais ces chiffres dissimulent d’incontestables inégalités de traitement puisque seules 2 % des entreprises atteignent 100 %.

Ainsi, le revenu salarial moyen des femmes est inférieur de 24 % à celui des hommes dans le secteur privé. En équivalent temps plein, le salaire moyen des femmes est inférieur de 15 %. Et si, à poste comparable (même profession exercée chez le même employeur), l’écart de salaire n’est plus que de 4 %, ce chiffre n’est pas corrigé de différences de caractéristiques comme l’ancienneté, l’expérience ou le diplôme, précise le HCE. Quant aux sanctions, elles restent largement insuffisantes : le rapport mentionne 712 mises en demeure et 42 pénalités depuis 2019 pour absence de publication ou incapacité à corriger les écarts. Au bout du compte, du fait des différences cumulées tout au long de la carrière, l’écart moyen de pension de retraite entre hommes et femmes est égal à 40 %. Énorme.

Il faut améliorer l’outil, pas le supprimer

S’il permet une meilleure prise de conscience des écarts de rémunération, l’Index n’a pas du tout rempli sa promesse, constate donc le HCE, qui formule un certain nombre de propositions afin d’améliorer ses modalités de calcul et la rémunération des femmes. Trois axes doivent être revus : le périmètre (1 % seulement des entreprises sont assujetties à l’Index), la méthodologie (omission du facteur « temps partiel » et des éléments de rémunération variable) et la notion de « valeur égale ». Cette dernière réflexion s’impose dans le cadre de la transposition de la directive européenne sur la transparence salariale de mai 2023 (prévue mi-2025 en France), qui vise à renforcer l’application du principe d’une même rémunération « pour un même travail ou un travail de valeur égale ».

À propos de l'auteur

Claire Nillus
Journaliste

Le HCE note qu’à l’instar de la plupart des pays européens, les inégalités en France ne se réduisent que très lentement ; et espère que « la transposition de cette directive offre l’opportunité de revoir l’Index égalité professionnelle pour le rendre plus efficace ». Dans cette perspective, il préconise d’introduire de nouveaux indicateurs portant sur le temps partiel et les bas salaires et d’examiner non seulement le nombre mais également le montant des augmentations et l’importance des promotions. Il plaide pour que l’on conditionne l’accès aux marchés publics des entreprises affichant un résultat satisfaisant et que l’on mentionne la note obtenue dans les offres d’emploi. Il souhaite également que les branches professionnelles se mobilisent pour agir sur les inégalités de rémunération, la mixité des métiers et la classification des emplois. La ministre du Travail a fait part de sa volonté d’ouvrir très prochainement une concertation avec les partenaires sociaux en vue de réformer cet outil mais n’a pas, à ce jour, donné de date de rencontre.